C’est quoi l’accessibilité numérique ?

L’accessibilité numérique (“a11y”) permet aux personnes en situation de handicap d’accéder aux contenus et services digitaux. Pour ce faire, on applique aux interfaces digitales des normes d’accessibilité émises par le W3C (World Wide Web Consortium) et pensées par des ergonomes pour chaque type de handicap.

L’accessibilité couvre également des notions liées à la compatibilité matérielle et logicielle ainsi qu’à la performance des réseaux. Tous les utilisateurs, sans discrimination, pourront alors Percevoir - Comprendre - Naviguer, mais aussi Interagir - Créer du contenu - Apporter leur contribution à l’univers numérique.

Outre son utilité première, à savoir la mise à disposition des contenus aux publics sans discrimination, l’accessibilité numérique présente de nombreux avantages – et pas des moindres – qui constituent autant d’opportunités pour les entreprises, bien au-delà d’une obligation légale.

LES ENJEUX DE L’ACCESSIBILITÉ NUMÉRIQUE

Prendre en compte les handicaps est utile à tous

Aujourd’hui, encore beaucoup de sites Web et d’applications mobiles sont conçus sans penser à la navigation des personnes en situation de handicap. Pourtant, pour ces personnes, l’outil digital représente un véritable levier d’intégration, et leur apporte bien souvent un surcroît d’indépendance.

Selon les différents types de handicaps, les manquements les plus couramment relevés sur le Web ne sont pas les mêmes – vous trouverez ci-contre un tableau récapitulant ces obstacles.

  • VISUEL

    • Images non assorties d’un texte alternatif
    • Liens identiques sur une même page
    • Absence d’alternatives aux cadres ou aux scripts
    • Contrastes de couleurs peu élevés
  • MOTEUR

    • Manque d’adaptation au niveau du clavier
    • Besoin de manipuler simultanément le clavier et la souris
  • AUDITIF

    • Aménagement de signaux sonores sans légende
    • Clips vidéo non assortis d’un sous-titrage texte
  • COGNITIF

    • Mauvaise utilisation des éléments structuraux d’une page
    • Manque de structure consistante pour la navigation

1. Accédez au marché des seniors

Une interface accessible s’avère en général plus ergonomique et plus simple d’utilisation que ses concurrents non accessibles. Elle peut être consultée et utilisée par tous, y compris les 12 millions de Français souffrant d’un handicap temporaire ou permanent.

Elle est également plus adaptée aux éventuelles déficiences physiques - de la fatigue oculaire ou auditive bénigne aux maladies invalidantes - dont peuvent souffrir les « seniors ».

Les seniors (les plus de 55 ans) représentent actuellement 18 millions de personnes en France, 127,4 millions en Europe, et 85 % d’entre eux souffrent de problèmes de vue. Or, avec le vieillissement de la population, le secteur Internet est en pleine transition.

La “silver economie” représentent un marché incontournable pour les entreprises présentes sur la toile. D’après l’INSEE, un tiers de la population française aura plus de 55 ans en 2050. Ignorer l’accessibilité numérique c’est se couper de facto d’une partie de ce marché.

2. Valorisez votre image citoyenne

À une époque où les organisations cherchent à valoriser leur image, la mise en œuvre de l’accessibilité est un excellent moyen pour mettre en exergue votre responsabilité citoyenne auprès du grand public, de vos actionnaires et de vos employés.

Investir dans l'accessibilité numérique c’est aussi valoriser votre marque employeur pour attirer les meilleurs talents.

3. Participez à la promotion du développement durable

Une interface accessible est aussi une interface plus lisible, et qui offre un confort de lecture potentiellement supérieur (avec les effets de loupe et la vocalisation, pour ne citer qu’eux) au support papier. Qui dit confort de lecture dit moins d’impressions inutiles.

L’accessibilité a aussi le mérite de replacer l’humain, l’individu au centre de toute démarche digitale.

Plus généralement, la Responsabilité Sociétale en Entreprise s’impose bel et bien comme un mouvement de fond pour les entreprises et l’accessibilité en fait partie. De plus, deux tiers des 250 premières entreprises françaises cotées ont enclenché une démarche en faveur du développement durable et de la responsabilité sociétale.

4. Obtenez une meilleure notation extra-financière pour votre entreprise

Pour les entreprises concernées, la notation extra-financière, ou « indice ESG », prend une importance grandissante. L’un des piliers du barème appliqué par les agences de notation concerne la transparence et l’accessibilité de toute communication à l’attention des différentes parties prenantes.

Par ailleurs, le comportement de l’entreprise en tant qu’employeur figure en bonne place dans ce même barème. Bien entendu, le fait d’adapter votre Intranet ainsi que votre plateforme de recrutement en ligne à tous les handicaps vous permettra d’employer plus de personnes handicapées, mais les bénéfices d’une telle démarche sont multiples. Cela renforcera la diversité au sein de vos équipes, tout en créant un environnement de travail globalement plus tolérant et plus sain, et en outre, ce critère entrera en compte dans la prochaine évaluation de votre politique RSE par les agences de notations extra-financières.

5. Améliorez votre référencement naturel

L’accessibilité facilite l’accès au contenu pour tous les utilisateurs, y compris pour les moteurs de recherche. De nombreux critères d'accessibilité rejoignent le SEO

Certes, l’accessibilité à elle seule ne suffit pas à garantir un bon positionnement dans les moteurs de recherche. Mais elle lève tous les obstacles à l’indexation et à la visibilité, et propose un contenu textuel sémantiquement correct, et donc naturellement optimisé.

6. Optimisez la performance de votre site

Vous savez sans doute d’ores et déjà que la performance de votre site Web dépend entre autres de sa compatibilité avec les navigateurs anciens et actuels. Par ailleurs, sa compatibilité avec les divers supports électroniques (smartphones, bornes interactives, tablettes, etc.) revêt, à mesure que les technologies évoluent, une importance cruciale.

Rendre son site web accessible c’est s’investir dans une démarche qualitative. Et au cas où vous vous posiez la question : oui, un site Web adaptatif ou responsive peut être accessible.

7. Réduisez les coûts de maintenance

Un peu de technique… L’une des règles de l’accessibilité est la séparation stricte du contenu et de sa présentation. Deux principaux avantages : les gains en temps de développement, et la flexibilité offerte par les feuilles de style.

Concrètement, aujourd’hui, il est possible de modifier l’apparence entière d’un site en quelques minutes à peine, en modifiant tout simplement la feuille de style qui y est associée. Chose qui s’avère impossible pour les sites obsolètes où contenu et contenant ne font qu’un !

Télécharger notre Checklist RGAA

STANDARDS EN VIGUEUR

Les normes internationales

Connues sous le nom de WCAG 2.1 (Web Content Accessibility Guidelines), les recommandations pour rendre les sites internet accessibles ont été édictées par le World Wide Web Consortium (W3C) par l’entremise de l’Initiative pour l’Accessibilité numérique (le WAI).

Considérées comme la norme mondiale, les WCAG 2.1 se déclinent en trois niveaux d’accessibilité :

LE NIVEAU A(ou « simple A »)

Niveau fondamental satisfaisant tous les critères d’accessibilité de priorité 1. Le site offre un accès global aux informations contenues dans les documents Web, pour un niveau d’accessibilité correct.

LE NIVEAU AA(ou « double A »)

Niveau satisfaisant tous les critères d’accessibilité de priorité 1 et 2. Le niveau d’accessibilité du site est amélioré, optimisé, et l’accès aux informations qu’il contient est grandement facilité.

LE NIVEAU AAA(ou « triple A »)

Niveau satisfaisant tous les critères d’accessibilité de priorité 1, 2 et 3. Le niveau d’accessibilité est excellent, et le confort de navigation est optimal pour tous les utilisateurs du site.

Evolution du WCAG 2.0 à 2.1

Les règles du WCAG dans la version 2.1 sont une continuité de la version 2.0, cela veut dire que si votre site est conforme WCAG 2.1 il sera également conforme WCAG 2.0.

Cette nouvelle version est en vigueur depuis juin 2018, les audits d’accessibilité sont donc tenus de respecter cette nouvelle version.

Les 17 nouveaux critères de cette version couvrent les 3 niveaux (A, AA et AAA). Elles concernent essentiellement les interfaces mobiles, certains outils vocaux, les troubles de la vision ainsi que certains handicaps cognitifs.

Les critères de niveau A

Critères

Recommandations d’accessibilité

1- Raccourcis clavier alphanumériques

L’utilisation de raccourcis clavier constitués d’une seule touche de caractère peut être source de confusion pour les utilisateurs de navigation vocale, qui peuvent déclencher accidentellement une action, ou une série d’actions, en dictant une phrase ou en utilisant des commandes spécifiques. Cela peut également affecter certains handicapés moteurs qui peuvent déclencher une action en appuyant par erreur sur une touche.

  • Mettre en place un mécanisme de désactivation du raccourci ;
  • Mettre en place un mécanisme de re-programmation de ce raccourci ;
  • le raccourci n'est actif que lorsque celui-ci reçoit le focus.

2- Labels ou étiquettes

Il s’agit de s’assurer que le label donné à un composant correspond bien au label accessible (aria-label par exemple) afin de rendre l’activation de cet élément via la commande vocale cohérente.

3- Annulation d’une action

Ce critère a pour objectif de s’assurer que les actions ne peuvent pas se déclencher accidentellement du fait d’une mauvaise gestion de l’événement déclencheur.

Un exemple d’application de ce critère serait de mettre à disposition de l’utilisateur un mécanisme d’annulation d’une action.

4- Les fonctionnalités à gestes complexes

Les utilisateurs porteurs de handicap moteur peuvent être gênés lorsqu’une fonctionnalité requiert l’utilisation d’un geste complexe (plusieurs doigts par exemple).

Fournir une alternative simple d’utilisation tel que les liens et les boutons.

5- Activation par mouvement

Sur mobile, certaines fonctionnalités peuvent être activées par le mouvement.

Il s’agit de s’assurer que :

  • Il existe une alternative accessible pour activer la fonctionnalité ;
  • Il existe un mécanisme pour désactiver l'activation par mouvement.

Les critères de niveau AA

Critères

Recommandations d’accessibilité

6- Orientation

La consultation du contenu doit être indépendante de l’orientation du terminal.

Il s’agit de ne pas verrouiller l’orientation du mobile ou de la tablette, l’utilisateur doit pouvoir basculer du mode portrait au mode paysage et inversement.

7- Contenu à saisir facilement déductible

La saisie des contenus d'un formulaire ne doit pas demander un effort de mémorisation soutenue.

Il s’agit de s’assurer qu’un processus d’authentification ne dépend pas uniquement de la capacité de l’utilisateur à mémoriser son mot de passe, par exemple en fournissant un moyen alternatif pour retrouver son mot de passe ou pour s’authentifier autrement.

8- Recomposition de contenu

  • Sur desktop, s'assurer que le contenu reste visible et cohérent à plus de 200% de zoom.
  • Sur mobile s'assurer que le contenu reste visible et cohérent sur les plus petits écrans (w 320px;h:256px).

9- Contraste des éléments graphiques

Il s’agit de s'assurer que le contraste est suffisant sur les éléments graphiques.

Deux niveaux de contrastes sont requis : 4.5 en général et 3 pour les éléments dont les dimensions sont au moins égales à 3 pixels.

10- Contraste des composants de l'interface utilisateur

Il s’agit de s'assurer que le contraste est suffisant sur les composants interactifs: liens, boutons, icônes, images, etc.

Deux niveaux de contrastes sont requis : 4.5 en général et 3 pour les éléments dont les dimensions sont au moins égales à 3 pixels.

11- Adaptation du texte

Il s’agit de vérifier qu’il n’y a pas de perte de contenu lorsque l’utilisateur personnalise certaines caractéristiques du texte.

12- Contenu affiché au passage de la souris

Le contenu affiché lorsqu'un élément reçoit le curseur de la souris ou le focus, doit être :

  • Ignorable : un mécanisme est prévu pour ignorer l'affichage de ce contenu ;
  • Sélectionnable : il est possible de sélectionner ce contenu ;
  • Persistant : le contenu reste affiché lorsqu'il reçoit le focus ou le curseur de la souris et disparaît lorsqu'il ne les reçoit pas (cas des title custom par exemple).

Les critères de niveau AAA

Critères

Recommandations d’accessibilité

13- Temps d’expiration d’une action utilisateur

Lorsqu’une action a une durée de vie limitée, s’assurer qu’il existe un mécanisme pour en avertir l’utilisateur.

14- Les animations interactives

Les animations interactives doivent pouvoir être désactivées sauf si celles-ci sont porteuses d'informations.

15- Taille du curseur

La taille du curseur ou du pointeur doit être au minimum de 44px sauf lorsqu'un mécanisme alternatif est proposé, comme un lien ou un bouton.

16- Mécanismes concurrents

Il s’agit de s’assurer que l’activation d’une fonctionnalité n’est pas dépendante d’une seule manipulation, que l’utilisateur dispose d’un moyen alternatif d’activation. Ce critère couvre aussi bien l’activation par commande vocale que par le clavier et la souris.

17- Le statut des messages

Cela concerne les messages qui rendent compte d’une mise à jour de statut à la fin d’une action par exemple.

Il s’agit de s’assurer que le message est bien énoncé par les technologies d'assistance sans avoir besoin de recevoir le focus.

En France, le RGAA 4.1

La direction interministérielle du numérique (DINUM) a édité le Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité (RGAA) dont voici la quatrième version a été mise à jour en février 2021 (RGAA 4.1).

Information officielle sur le RGAA 4.1

Le RGAA 4.1 est rédigé sur la base des normes internationales WCAG 2.1. Il est nécessaire à la mise en ligne des sites et services Intranet et Internet de l’administration française, mais aussi des entreprises dont le chiffre d'affaires est d'au moins 250 millions d'euros en accord avec le décret n° 2019-768 du 24 juillet 2019.

Et dans les autres pays ?

La majorité des pays ont fini par adopter comme référence le niveau Double-A des normes internationales WCAG 2.1. Toutefois, certains pays ont mis en place leurs propres référentiels d’accessibilité en sélectionnant ou en complétant les critères des WCAG 2.1.

CE QUE NOUS DISENT LES LOIS

Dans le secteur public, l’accessibilité numérique est une obligation légale

Dans beaucoup de pays occidentaux, l’accessibilité numérique est devenue une obligation légale pour les sites des services publics et des communautés territoriales.

En France, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, exprime très clairement ces nouvelles exigences légales : « Les services de communication publics en ligne des services de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées. L’accessibilité des services de communication publics en ligne concerne l’accès à tout type d’information sous forme numérique quels que soient le moyen d’accès, les contenus et le mode de consultation. Les recommandations internationales pour l’accessibilité de l’Internet doivent être appliquées pour les services de communication publique en ligne. (…) Le décret énonce en outre les modalités de formation des personnels intervenant sur les services de communication publique en ligne. »

Le secteur privé également concerné, notamment en matière d’emploi

La loi du 11 février 2005 est moins catégorique quant aux obligations légales des entreprises privées. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’accent n’est pas mis sur le droit à la consommation des personnes handicapées – mais ça ne saurait tarder. Toutefois, ce qui ressort très clairement d’une lecture attentive des textes, c’est que l’égalité des chances et l’accès à l’emploi des personnes handicapées sont pris très au sérieux :

« Afin de garantir le respect du principe d’égalité de traitement à l’égard des travailleurs handicapés, les employeurs prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs handicapés d’accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l’exercer ou d’y progresser, ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en œuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l’employeur. »

Le décret de loi 2019-768 va encore plus loin concernant l’accessibilité numérique. Il impose désormais aux entreprises privées françaises dotées d’outils et contenus web, de plus de 250 millions d’euros de chiffres d’affaires de se mettre en conformité à travers plusieurs obligations :

  • Publication d’une déclaration d'accessibilité,
  • Publication d’un schéma pluriannuel de mise en accessibilité web et d'un plan d’action annuel,
  • Mise en place de dispositifs d’assistance et de contact permettant la remontée de défaut d'accessibilité.

Dépendamment de la date de création et du type de ressource numérique à rendre accessible, plusieurs dates sont attendues :

  • À compter du 23 septembre 2019 pour les sites internet, intranet et extranet créés depuis le 23 septembre 2018 
  • À compter du 23 septembre 2020 pour les sites internet, intranet et extranet créés avant le 23 septembre 2018 
  • À compter du 01 juillet 2021 pour les applications mobiles, les progiciels et le mobilier urbain numérique.

Que se passe‑t‑il hors de nos frontières ?

Selon les pays, les lois sont plus ou moins complètes par rapport à la loi française, et les pratiques suivent en conséquence. Par exemple, aux États‑Unis, l’affaire Domino’s Pizza a engendré une multiplication des plaintes au tribunal pour non respect des normes d’accessibilité.

Si vous souhaitez vous implanter à l’étranger, et tout particulièrement si vous êtes un pur player, un petit détour par les textes de loi sur le handicap s’imposera donc, au même titre que les recherches approfondies que vous mènerez sans doute sur la fiscalité et les exigences administratives du pays en question.

  • Télécharger le Guide des Bonnes Pratiques